" Mais enfin, très chère, est-ce là le plus important ? "

Bien sûr que oui !
Tout mon être le criait, au point de me tirer un petit soubresaut tandis que je le laissais continuer, gardant les lèvres scellées. Un cadeau n'a pas la même signification selon celui qui l'offre et on n'offre rarement un cadeau par hasard. Savoir si ce présent me venait des Perfides m'indiquerait si je devais m'en méfier ou non car comme l'avait soulevé mon effrayant bienfaiteur en me le remettant, ce petit bout de papier avait la capacité de m'attirer peut-être plus d'ennuis que si je ne l'avais pas possédé.

Et si le cadeau venait d'un Perfide, rien ne l'empêchait d'aller le crier sur la place publique et d'attendre qu'on vienne me réduire en pièce pour le récupérer. Voir même de les observer faire en souriant à pleines dents. J'imaginais assez bien Nevroze dans ce rôle là, je dois bien l'admettre. Après tout, ma famille n'avait-elle pas défié la sienne en leur retirant les deux derniers ? N'était-ce pas la meilleure raison du monde de me vouloir du mal ?

" Reviens nous rendre visite un autre jour, et l'accueil en sera différent. Pas de prix. Juste un jeu. Toi, ou nous. "

Donc il y avait bien quelqu'un derrière tout ça. Et qui pouvait se cacher derrière les monstres (même si j'avais de plus en plus de mal à considérer ce pantin comme tel, malgré son faciès horrible) de cette ville, à part les Perfide ?
Enfin, je me levais en soupirant doucement et je m'apprêtais à quitter cet endroit. Juste le temps de formuler une derrière phrase et je disparaissais du chapiteau.

-C'est dommage que le jeu soit dans ces termes. C'est stupide mais depuis mon arrivée, vous avez sans doute été la "personne" la plus sympathique que j'ai rencontré.

Compassion.
Compassion que je savais dangereuse, car elle est capable de retenir une pression sur la gâchette, d'arrêter un coup de couteau avant sa cible et de poser des questions profondément humaines mais nuisibles à la survie.
Tuer froidement une personne hostile dont je ne connaissais rien ne me posais pas de soucis, j'étais conditionnée à pouvoir tenir mon arme contre quelqu'un et à faire feu si la situation l'exigeait. Mais quand on connaissait les raisons de l'agresseur, que la pitié ou la compassion s'en mêlait, c'était une autre paire de manches.

Pour ma propre sécurité, je conclus donc qu'il valait mieux que je reste éloignée de ce parc d'attraction.