La lune avait prit sa forme ronde depuis longtemps. Dans le ciel, de faibles nuages d'une couleur bleutées traînaient doucement contre la couche noire qui recouvraient le tout. Sous le satellite, une silhouette cachée sous un capuchon avançait doucement dans l'ombre. Il n'y avait ni chat ni rat, pas même un bruit en dehors du froissement de tissus en toile qui recouvrait l'être isolé. Deux petits yeux bleus brillaient sous la lumière des deux réverbères qui entouraient le portail d'entrée de la Maison Close. Contre ses jours, une mèche de cheveux balayait l'air et chatouillait sa peau, mais elle ne souriait pas. Son regard restait pleinement concentré sur la grande bâtisse qui se dressait là. L'intérieur de la maison était encore éclairé et les mouvements des filles de joie qui traînaient ça et là dans les pièces étaient parfaitement visibles par les fenêtres.
Nevroze les observait, debout devant l'entrée, sans se cacher. Elle savait que personne ici ne ferait attention à elle, car tous étaient occupés, beaucoup trop occupés pour jeter un œil dehors. Les rires et les discussions étaient audibles, et les sons traversant les murs flottaient jusqu'aux oreilles de Nevroze. Une ride se dessina sur son front. Ses lèvres se pincèrent. Le doute persistait encore en elle, mais une phrase, aussi innocente d'une fleur, trottait dans esprit comme une vielle rengaine.

" Les mots sont une source de puissance infinie Nevroze. Utilise les comme une gomme effacerait une erreur dans une phrase. Supprime les maux, Nevroze. Supprime ce qui te semble incorrect, supprime les maux, et reconstruit tout à ton image. "

Ses joues tremblaient. Nevroze se mordait la lèvre intérieur. Les maux... Il y en avait tant dans ce lieu. Beaucoup trop de lumière dépassait de ce lieux et se dispersait alentour. Cet endroit était une farce qu'il fallait effacer immédiatement. Il n'y avait plus à en douter.

Ses yeux s'illuminèrent d'une lueur qui n'avait rien à voir avec ce que renvoyait ce grandiose espace, et en un instant, la pièce principale dans laquelle quelques ombres bougeaient encore pris feu. Un départ sur les rideaux et la tapisserie, et tout s'enflamma en prenant son souffle sur la boiserie.  Les rires cessèrent, et des crient s'échappèrent des lieux. Ah comme cela sonnait doux aux oreilles de Nevroze. Bien mieux que les rires précédents. Mais des rires ici, il n'y en aurait plus. Il n'y aurait plus que des cris, à partir de maintenant, et jusqu'à ce qu'elle en décide autrement.

A l'intérieur, les filles de joie couraient dans tous les sens, mais Nevroze se concentrait sur une toute autre personne.
Elle resta devant le portail, à observer les lieux prendre feu doucement sans que personne ne prenne la peine de l'éteindre. Les cris résonnaient comme une farce eux aussi mais qu'importe. Un certain temps avant qu'enfin le feu embrase la seule pièce qui importait, et enfin, le son grave qu'elle attendait tant s'éleva et tambourina dans l'air. Enfin. Il n'y avait plus que lui, et bientôt, il n'y aurait plus rien.

Un sourire se dessina sur les lèvres de Nevroze. Alentours il n'y avait rien. Elle resta là à regarder la maison close d'enflammer et disparaître doucement sous la caresse délicieuse des flammes jusqu'à ce qu'il ne reste plus de ce lieu que des murs noirs recouverts de cendre. Enfin, elle resserra son capuchon, et repris la route en direction de sa chaumière.